CONFÉRENCE DE PRESSE DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Copenhague – Vendredi 18 décembre 2009

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En présence de Jean-Louis BORLOO et de Chantal JOUANNO et de Valérie LETARD, je voudrais tout particulièrement remercier Jean-Louis et Chantal qui sont bien là depuis de nombreuses journées, Valérie aussi.

Voilà, nous avons un accord. Jusqu’au dernier moment, la délégation française et moi-même, nous avons réfléchi sur ce qu’il convenait de faire. Je vais essayer de vous rendre compte le plus rapidement possible des données du problème, de ce qui a été retenu et de ce qui a été engagé.

La problématique est exactement la suivante : si on veut sauver la planète de la catastrophe, il faut embarquer tout le monde, 6 milliards d’individus, 192 pays, parce que la planète est un tout et si on laisse polluer dans un coin, tous les efforts que l’on fera dans l’autre seront complètement annihilés.

Donc, si on veut être efficace il faut emmener tout le monde, il faut accepter de faire des compromis.

Tel a été le dilemme ? Jusqu’au dernier moment, puisque sans doute avez vous vu que dans le bureau de la France, deux heures avant l’accord, se trouvaient Madame MERKEL, Gordon BROWN, Frédéric REINFELDT, en tant que Président de l’Union européenne, Monsieur BARROSO et Barack OBAMA, en compagnie des ministres. C’est dire que nous avons discuté de façon approfondie de la difficulté du choix qui se posait à nous.

Nous avons choisi d’approuver l’accord que je vais maintenant vous présenter. C’est une négociation extraordinairement difficile parce qu’elle engage la planète entière, le Nord, le Sud, l’Est et l’Ouest, les riches, les pauvres, tout le monde. Et nous devons nous mettre d’accord, au même moment, sur des éléments qui touchent aux intérêts vitaux des pays concernés. Non seulement cela concerne tout le monde, ce qui est un élément de complexité, mais en plus, cela touche des intérêts vitaux, dans la crise économique la plus violente que le monde ait connu en un siècle.

Je pense que l’accord que nous avons trouvé est un accord positif parce qu’il engage toute la

communauté internationale.

Tout le monde accepte la perspective de limiter le réchauffement à 2 degrés maximum. Ce qui était la recommandation du GIEC, des scientifiques, devient la règle de 100% des pays de la planète, y compris, bien sûr, la Chine, l’Inde, l’ensemble de nos partenaires, tout le monde.

Deuxième engagement, tout le monde a accepté de donner par écrit les chiffres précis de ces

réductions d’émission d’ici à 2015-2020. Tout le monde, c’est-à-dire qu’annexé à l’accord, chaque pays aura une feuille sur laquelle il mettra ses objectifs de réduction d’émissions, y compris la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud, le Brésil. La totalité de ces engagements chiffrés sera présentée au mois de janvier, parce que cela ne pouvait pas se faire ce soir, mais enfin la décision est prise, ce sera rédigé en janvier.

Les 2 degrés et une répartition des réductions d’émission écrite annexée à l’accord, tout le monde s’engage à respecter ces objectifs ainsi inscrits. Ce respect se fera d’abord parce que c’est un engagement politique donc chaque pays sera confronté à l’engagement politique qu’il a pris dans le cadre de la négociation dite de Copenhague. Et deuxièmement, chaque pays s’engage à adapter sa législation nationale pour la rendre conforme aux engagements qu’il a pris par écrit. Cela veut dire que chaque pays s’engage à évaluer ses engagements, à rendre compte de ses efforts et à rendre sa législation obligatoire pour réaliser ces efforts.

Quatrième élément, le monde entier s’est entendu sur la nécessité de mettre en place des financements innovants, y compris les Etats-Unis d’Amérique qui acceptent les financements innovants. Un groupe de haut niveau sera créé au début de 2010 pour établir les financements innovants, étant entendu que nous avons souhaité maintenir toutes les possibilités, taxation des transactions financières, taxation du fuel maritime, car notre conviction, c’est que vraisemblablement, on aura besoin non pas d’un financement innovant, mais de plusieurs financements innovants. La décision est prise.

Tout le monde s’est entendu sur la proposition que nous avions faite avec Gordon BROWN des 10 milliards de dollars par an pour les pays les plus pauvres en 2010-2011-2012. La seule modification, c’est que la pente ne sera pas forcément pour chaque pays la même somme chaque année, les Etats- Unis d’Amérique nous ayant demandé de consolider l’objectif des 30 milliards sur 3 ans, mais de les laisser donner plus la troisième année que la seconde et plus la seconde que la première.

Tout le monde s’est mis d’accord pour après 2012, sur 100 milliards de dollars par an, à partir de 2020. En liaison avec l’accord donné par la communauté internationale sur les financements innovants. Et tout le monde a accepté l’idée proposée par la France, c’est Jean-Louis BORLOO qui l’avait portée que sur les 100 milliards, comme sur les 30 d’ailleurs, 20% soient consacrés à la lutte contre la déforestation et 40% soient consacrés à l’Afrique. SI vous voulez, cela veut dire que dès 2010, c’est 2 milliards de dollars pour la forêt et qu’à partir de 2020, c’est 20 milliards de dollars pour la forêt, c’est absolument considérable. Cette répartition a été acceptée par tout le monde.

Par ailleurs, et je m’en entretenais il y a quelques minutes avec José Manuel BARROSO, il le dira lui même, l’Europe proposera la création d’une Organisation européenne de l’environnement, qui aura deux responsabilités, contrôler les engagements écologiques environnementaux de chaque pays et contrôler le respect des engagements financiers à destination des pays les pauvres. Pourquoi au niveau européen ? Parce qu’on ne l’a pas obtenu au niveau mondiale. Mais l’Europe est décidée à montrer le chemin et naturellement cette organisation aura vocation à accepter les candidatures de tous les pays qui voudront participer à ses travaux.

Bien sûr, le texte que nous avons n’est pas parfait. D’abord, ce n’est pas un traité, même si nous demandons la transformation de cet accord en instrument juridique contraignant pour 2010. Cette demande est faite en accord avec les Etats-Unis d’Amérique et toute l’Europe. Angela MERKEL organisera une conférence à Bonn dans 6 mois, pour préparer Mexico et que l’on n’ait pas les mêmes problèmes d’organisation que ceux que nous avons trouvés, même si ce n’était pas facile. On félicite les organisateurs, mais enfin, peut-être avez-vous noté quelques faiblesses dans l’organisation. Je ne critique naturellement personne.

On aura également un mécanisme de révision de cette décision en 2015, puisque comme vous le savez, le GIEC c’est-à-dire le groupement des scientifiques internationaux, doit rendre un rapport en 2014 et il était donc tout à fait normal que nous nous engagions à revoir ces prévisions en fonction du constat des scientifiques.

Voilà, nous avons, vous l’avez vu, d’arrache-pied. Hier, tout était bloqué, les négociations

n’avançaient plus. Je crois que la réunion que nous avons demandée cette nuit avec le Président LULA a été très utile. Il y a eu beaucoup de tensions, je ne vous le cache pas. A un moment donné, nous avons pensé que certains des grands participants étaient décidés à quitter la conférence, et nous ne sommes pas passés loin d’une absence d’accord.

Il faut bien comprendre une chose, c’est que cet accord, d’abord, nous fait faire des progrès sur un certain nombre de sujets considérables, mais que s’il n’y avait pas eu d’accord, cela aurait voulu dire que deux pays aussi importants que la Chine et l’Inde, qui représentent 2 milliards et demi d’habitants sur 6 milliards, se trouvaient libérés de toute forme de contrainte puisque ces pays ne sont pas dans Kyoto, qui concerne 38 pays. Et si nous n’avions pas d’accord, ils s’exonéraient absolument de toute contrainte, y compris celle de s’engager sur des réductions d’émission et celle des 2 degrés. J’ajoute que si nous n’avions pas eu d’accord, les Etats-Unis d’Amérique, qui ne sont pas eux-mêmes dans Kyoto, seraient trouvés libérés de toute forme de contrainte. C’est pourquoi un accord était absolument vital pour l’équilibre de la planète.

L’Europe est restée constamment unie, a été constamment sur une position commune. Je veux préciser que l’Europe réaffirme tous ses objectifs de réduction d’émission de CO2, c’est-à-dire 80% d’ici 2050 et 30% d’ici 2020, sous réserve de la publication des annexes de chacun des pays naturellement. Mais, la France a veillé à ce que nous restions bien sur les 30%.

Je veux également dire combien ce fût agréable de travailler avec le Premier ministre MELES, qui a fait un travail remarquable de coordination de l’Afrique et qui voit son travail récompensé, parce que ce sont des sommes considérables qui vont maintenant être mobilisées pour les pays les plus pauvres.

Je veux remercier également le Président LULA et, par ailleurs, le Président OBAMA a eu

constamment le soin que les Etats-Unis et l’Europe puissent travailler main dans la main.

Dernière modification : 17/02/2011

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